UN PRINTEMPS FRANÇAIS
Paris, Printemps 2016.
C’était il y a 2 ans.
C’est long et c’est court en même temps 2 ans.
C’est loin sans l’être, on s’en rappelle sans vraiment s’en rappeler 2 ans.
Personnellement je me rappelle de cette soirée, (je ne sais plus où et comment j’avais rencontré Alexandre du collectif Fée Croquer), ce qui est sûr c’est qu’on s’est retrouvés ce soir là quai d’Austerlitz.
Il faisait nuit, il faisait froid.
Puis il a fait chaud d’un coup dès mes premiers flashs.
Tension qui monte, esprits qui s’échauffent.
Quand on a pas de maison, c’est comme ça qu’on se réchauffe.
Puis on se regarde, on se rassure, on essaie de se comprendre comme on peut.
Comment discutent un Soudanais, un Libyen ou un Érythréen avec un mec de Coulommiers ?
Ils parlent avec les mains, avec les yeux.
En leur faisant comprendre que nous on est là pour eux.
Nombre de colis, de repas chauds et de cafés ont été distribués ce soir là.
Migrants, SDF au long cours, je n’ai vu que des gens dans le besoin.
Pas des gens méchants, des gens en chien. Et être en chien peut rendre méchant, si de chaque côté personne n’est intelligent, ça il faut le comprendre.
Comment un Soudanais, un Libyen ou un Érythréen arrive sous le pont d’Austerlitz, à deux pas du Wanderlust ?
Comment aborder un SDF dans la rue depuis 30 ans ?
Sommes-nous vraiment bien placés pour donner des leçons ?
Printemps 2016, 1er Mai et Nuit Debout.
Des idées neuves et des gens dehors. Des assemblées place de la République, des commissions. La démocratie directe et participative s’exprime. On y parle « oligarchie », « éducation populaire ». Bien-sûr ça fait des barbeucs et fume du shit. Dans le contexte post-attentat de novembre 2015, c’est quelque chose. On y trouve les déçus de la gauche, les cocos bien-sûr, mais aussi plein d’autres choses. De jolies idées qui essaient de faire espérer une rentrée pas trop morose.
Quoi ? La rue se re-politise ?
Réponse du gouvernement via Cazeneuve à la traditionnelle marche du 1er Mai: déploiement de 3000 CRS. On ne déconne pas avec l’état d’urgence.
Leur principale activité: l’envoi systématique de cartouches explosives lacrymogènes, en plein milieu des foules, n’ayant pour la plupart, absolument rien fait (sans compter l’utilisation du spray au poivre pour éloigner les manifestants les plus proches des lignes de CRS).
Je m’en souviens, j’ai été gazé 4 fois en moins de 2 heures.
Gamins, personnes âgées, et femmes furent également gazés, pas de détails de la part des Forces de l’Ordre.
Le Boulevard Diderot recouvert d’un épais nuage de lacrymo, impossible de voir au travers. Mais au moins les tonfas n’ont mis aucune gueule de travers ce coup-ci. On repense au jeune qui aura quand même perdu un oeil quelques jours auparavant à Rennes à cause d’un flashball.
Gros décalage entre les messages et l’attitude des manifestants observés en nombre et la réponse donnée par le gouvernement ainsi que le traitement médiatique de ces événements.
« Faible mobilisation » , « violences », « casseurs », qu’ils disent, comme d’habitude.
2 ans après, Ruffin est à l’Assemblée Nationale, Valls entrain de refaire son passeport, Hollande vend ses livres et Macron est aux commandes.
Hulot a eu aussi un peu les clefs, mais pas longtemps.
Qu’en est-il vraiment ?
Quand on regarde le présent on se rend compte que toutes ces situations au pire empirent, au mieux ne changent pas. Comment comprendre ce sens que l’on donne à la France. Nous sommes désormais « En Marche », mais est-ce pour autant que l’on avance ?